Les 10 et 11 juillet 2023, en pleine canicule, les sénateurs ont consacré leur séance publique à l’examen du projet de loi dit « pour le plein emploi ». L’objectif déclaré est « d’améliorer le fonctionnement du marché du travail » et de « parvenir au plein emploi » en réorganisant l’accompagnement des demandeurs d’emploi et des bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA).
Parmi les mesures de ce projet, on peut citer :
· la création du réseau- « France Travail », qui regroupera Pôle emploi et les acteurs de l’insertion (Missions locales…) ;
· l’inscription automatique des bénéficiaires du RSA et de leurs conjoints sur la liste des demandeurs d’emploi ;
· la signature d’un contrat d’engagements réciproques renforçant les obligations des allocataires ;
· la mise en place de nouvelles modalités de sanctions, visant à suspendre ou à supprimer le RSA, dans le but prétendu de « remobiliser les bénéficiaires » (on reconnaît ici le jargon d’un énième cabinet d’audit, sans doute « mobilisé » à coups de millions d’argent public)…
Avant l’examen en séance, la Défenseure des droits (DDD) a émis, le 6 juillet 2023, un avis à l’attention des sénateurs, pour les mettre en garde contre les conséquences du projet de loi, s’agissant notamment des allocataires du RSA et les demandeurs d’emploi.
La Défenseure des droits a relevé que les nouvelles mesures laissent supposer que les allocataires sont principalement responsables de leur éloignement du marché de l’emploi, en raison de leur manque de motivation. Bien que déjà mis en oeuvre depuis la création du RSA, le recours à un contrat d’engagements réciproques, assorti d’obligations accrues pour l’allocataire et conditionnant le versement du RSA, ne fera que renforcer la stigmatisation (sur le modèle du film Moi, Daniel Blake, de Ken Loach ?).
La Défenseure des droits a souligné que l’accès à un accompagnement réel vers l’emploi pour les personnes éloignées du marché du travail doit être un véritable droit, opposable à l’État, tenu de faire tout ce qui est en son pouvoir pour faciliter leur insertion professionnelle, ce qui n’a pas été le cas depuis la création du RMI et du RSA…
Les dispositifs d’insertion professionnelle et les politiques publiques dans ce domaine sont d’une grande importance, et la réorganisation des acteurs de l’emploi prévue par le projet doit s’accompagner de ressources financières suffisantes, en particulier pour les personnes en situation de handicap.
L’avis de la Défenseure des droits soulève également une discrimination envers les moins de 25 ans, qui sont exclus du RSA. Si le RSA devient exclusivement un moyen d’accéder à l’emploi, le maintien d’une condition d’âge pour en bénéficier pourrait être considéré comme discriminatoire.
En ce qui concerne les sanctions, le projet de loi envisage de nouvelles modalités de suspension ou de suppression du RSA, plus discrétionnaires, ce qui augmentera les risques d’erreur et d’arbitraire. La Défenseure des droits suggère que toute sanction ne puisse être prononcée que si les opérateurs des politiques de l’emploi et de l’insertion ont été en mesure de garantir un accompagnement réel et approprié aux bénéficiaires du RSA.
En outre, aucune disposition n’est prévue pour protéger un minimum vital en cas de suspension de l’allocation, ce que l’on appelle le « reste à vivre ». L’Assemblée devra aussi apporter des éclaircissements sur des points tels que l’inscription automatique des conjoints sur la liste des demandeurs d’emploi, dont les objectifs et les conséquences restent encore flous.
La Défenseure des droits affirme qu’elle restera vigilante concernant les risques pour les droits fondamentaux des personnes les plus précarisées, comme évoqué dans son avis 23-05. Les débats semblent déjà concentrés sur le périmètre, le fonctionnement et les coûts de la création du réseau France Travail, mais des détails sur les modalités des dispositifs d’accompagnement qui en découleront sont également attendus.
DBKM AVOCATS intervient auprès des allocataires en cas de suspicion de fraude, de notification de pénalités ou de notification de pénalités après recours gracieux. Si vous êtes concernés, n’hésitez pas à nous contacter.